Un oeuvre dont les images animées et en perpétuelle évolution sont générées par l’intelligence artificielle rejoint la collection du mythique musée new-yorkais.
Image en couverture : © Refik Anadol – Unsupervised (MoMA)
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Le Moma fait l’acquisition de Unsupervised de Refik Anadol
À New York, le Musée d’Art Moderne est une institution qui dépasse depuis longtemps les frontières de la ville.
Le MoMA fait aujourd’hui parti des plus importants musées du monde, même s’il reste quelques échelons derrière le MET (Metropolitan Museum of Art), également situé à New York. Et loin derrière le Musée du Louvre, qui accueille chaque année plus de sept millions de visiteurs (voir notre article sur les musées les plus visitées au monde en 2022).
Le MoMA vient de compléter l’acquisition d’une nouvelle oeuvre très particulière, qui mêle l’analogique et le numérique. Intitulée Unsupervised, elle fait partie de la série Machine Hallucinations, et elle a été créée par l’artiste Refik Anadol (né en 1985), qui a utilisé l’intelligence artificielle “pour interpréter et transformer plus de 200 ans d’art au MoMA”.

Une oeuvre qui mêle l’image, la vidéo, le mouvement et l’intelligence artificielle
Refik Anadol définit Unsupervised comme “une méditation sur la technologie, la créativité et l’art moderne”.
Il a créé et utilisé un modèle basé sur le machine-learning et en particulier StyleGAN2, un algorithme développé par des chercheurs de NVIDIA (utilisant ADA (adaptive discriminator augmentation)), qu’il a entrainé sur la base du MoMA, composée de 138 151 images. Un ensemble très vaste, traversant plus de deux siècles de créations, et comprenant des peintures, des photographies, des images de sculptures, mais aussi de voitures et de jeux vidéos.
Le point fort de cette oeuvre, c’est que les données apportées ne sont pas étiquetées : elles ne font pas l’objet d’attributions humaines de caractéristiques de désignation, comme le nom, la taille, les couleurs, les personnes et objets qui sont représentés dessus, etc… C’est à l’algorithme de faire ce travail lui-même, dans ce qu’on appelle l’apprentissage non supervisé.
D’où le nom de l’oeuvre : “Unsupervised”. Mais l’artiste a quand même ensuite retravaillé la base pour la regrouper en catégories thématiques, afin de permettre une construction évolutive visuellement cohérente, même si aléatoire.
De là, Refik Anadol laisse son algorithme concevoir ses propres images en exploitant sa base de connaissance, mais surtout en lui laissant une totale liberté pour “halluciner” (inventer des choses, comme peut le faire ChatGPT, version texte). Son oeuvre produit ainsi une image évolutive aussi impressionnante que graphique.
De plus, lorsque l’oeuvre est inactive ou n’est pas observée par un visiteur, “l’IA régénère les archives du MoMA, construisant de nouvelles combinaisons esthétiques d’images et de couleurs à travers des lignes uniques dessinées par des connexions algorithmiques”.
Une image et un son qui évoluent aussi en tenant compte des informations et facteurs extérieurs : changements de lumière, de mouvement, d’acoustique et de météo extérieure.
Refik Anadol a aussi la possibilité de personnaliser le type d’images qui sont produites par rapport à des facteurs qu’il décide : récemment, il avait travaillé Unsupervised pour que les images soient orientées vers les nouvelles œuvres d’art au MoMA.

L’artiste avait aussi détaillée :
“Pour moi, ce qui est inspirant, c’est ce qu’il se passe quand on n’utilise pas une technologie telle qu’elle nous est imposée, mais qu’on l’utilise d’une manière différente. Dans ce contexte, Unsupervised fait quelque chose de différent. Elle ne suit pas exactement les données d’étiquetage et n’essaie pas d’imiter la réalité. Elle essaie de créer et de spéculer sur l’imagination d’une machine”
Refik Anadol a partagé sa joie d’être intégré à la collection du MoMA sur les réseaux sociaux, avec ce message :
“Chers amis,
Je suis profondément honoré d’annoncer que notre œuvre Unsupervised a été acquise par le MoMA et fait désormais partie de la collection permanente du musée !Cette acquisition marque une étape importante dans le parcours de notre studio et également pour l’art numérique. Il inscrit un chapitre historique alors que le MoMA accueille la première IA générative et les premières œuvres d’art tokenisées dans sa prestigieuse collection permanente.
Je suis infiniment reconnaissant à nos conservateurs Michelle Kuo, Paola Antonelli et Stuart Comer pour leur sagesse ainsi que pour le véritable soutien et la collaboration de toute l’équipe du MoMA depuis le début du projet.
Nous sommes également profondément reconnaissants à nos collectionneurs, Ryan Zurrer, Pablo Rodriguez-Fraile et Desiree Casoni, ainsi qu’à NVIDIA pour leur soutien dans notre aventure.
Depuis près d’un an maintenant, nos œuvres ont apporté de la joie, de l’inspiration et de l’espoir au public du musée ! Merci du fond du cœur à New York et à tous les visiteurs du MoMA !”
En 2022, Refik Anadol avait aussi produit une oeuvre similaire en France, pour le Centre Pompidou – Metz. Baptisée Rêves de nature, il s’agissait également d’une immense toile numérique de 10 mètres par 10 mètres.
Pour en savoir plus :
- Le site de l’artiste, et la page dédiée à Unsupervised
- La page dédiée à Unsupervised sur le site du MoMA : https://www.moma.org/calendar/exhibitions/5535