Avec un système placé à l’extérieur du corps et une utilisation de cellules souches, une équipe scientifique chinoise progresse vers un foie artificiel fonctionnel.
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Un foie artificiel à l’essai en Chine
D’après un rapport du cabinet Frost & Sullivan, la Chine compterait chaque année entre 500 000 et 1 000 000 de nouveaux individus atteints d’insuffisance hépatique. Et aucun médicament ne peut totalement guérir cette affection mortelle, et les traitements conventionnels ne font généralement que gérer la maladie et sa progression dans le temps.
Une greffe du foie reste le seul traitement efficace, mais son utilisation est limitée par le manque de donneurs de foie, une intervention chirurgicale complexe, des coûts élevés et la nécessité d’immunosuppresseurs à vie. Aussi, on a commencé à travailler autour de la création de foies artificiels dès les années 70 et 80.
L’un des pionniers dans le domaine est une société américaine nommée Vital Therapies, qui a réalisé le plus grand nombre d’essais cliniques pour le moment. Entre 1999 et 2018, l’organisme a collecté les données et les résultats de 11 essais cliniques de son système d’assistance hépatique extracorporelle, impliquant environ 600 patients. Cependant, son utilisation n’a pas été approuvée par les régulateurs américains, après l’échec de l’essai en phase III.
Du côté de la chine, le professeur Gao Yi est l’un des chercheurs à la pointe de la recherche sur le sujet du foie artificiel. Il est aujourd’hui directeur exécutif du Centre de médecine translationnelle de l’hôpital Zhujiang de l’Université de médecine du Sud, dans la province du Guangdong.
L’homme a commencé ses recherches dans le domaine en 1996. Il s’agissait du premier projet de ce type financé par la Fondation nationale des sciences naturelles de Chine, explique-t-il au média South China Morning Post (SCMP). Aujourd’hui, il présente les derniers résultats du projet de foie artificiel qu’il développe en collaboration avec l’entreprise Qian Hui Biotech.
Un foie bio-artificiel situé en dehors du corps, mais qui fonctionne avec
Son équipe a créé un “bioréacteur” pour un foie artificiel (ou bio-artificiel) : il s’agit d’un dispositif situé en-dehors corps “qui effectue le travail de détoxification et de synthèse des protéines et des produits chimiques nécessaires à la digestion et à la croissance du foie”.
Le sang circule à travers le bioréacteur, dans lequel un système de membrane à fibres creuses permet de faire croître des cellules souches et des substances essentielles, qui sont ensuite introduites dans la circulation sanguine du patient, et l’aident à régénérer les tissus et à supprimer les dommages au foie causés par l’inflammation. Des membranes similaires sont déjà utilisées régulièrement dans d’autres processus médicaux, comme la dialyse, mais c’est la première fois qu’elles sont utilisées pour cultiver des cellules souches.
Grâce aux cellules souches, le procédé obtient une première validation de l’administration
Le but du foie artificiel développé par Gao Yi est de suppléer un foie malade jusqu’à ce qu’il se régénère, ou jusqu’à ce qu’une possibilité de greffe soit trouvée et qu’une transplantation soit faite.
Toutefois, avant d’être approuvé pour une utilisation clinique “ordinaire”, ce dispositif innovant doit démontrer son efficacité totale et son absence de problèmes et vices cachés lors d’une successions de phases d’essais cliniques. C’est dans cette direction qu’avance désormais Gao Yi et son équipé, après avoir obtenue un “feu vert des autorités chinoises” pour des essais cliniques.
Gao Yi se montre très enthousiaste, et avance des premiers chiffres impressionnants :
“Dans des modèles animaux impliquant des porcs et des singes, nous avons observé que notre méthode augmentait le taux de survie de 17 pour cent, comme avec les traitements conventionnels, à 87,5 pour cent.
Son efficacité semble très bonne, observée aussi bien dans des modèles cellulaires que dans des modèles animaux comme la souris, le porc et le singe. De plus, notre contrôle qualité en production est stable.”
D’après Jiao Xingyuan, professeur et spécialiste de la transplantation hépatique à l’hôpital de l’Université Sun Yat-sen à Guangzhou (qui n’a pas participé au projet), le projet est révolutionnaire, et les attentes pour la suite sont très grandes :
“La thérapie hépatique artificielle à base de cellules souches proposée par le Dr Gao est une stratégie simple et efficace. Nous attendons avec impatience l’application généralisée de cette méthode de traitement dans la pratique clinique.”
Mais de longues années d’essais, d’échecs et de réussites seront nécessaires avant que le procédé soit finalisé, et que ce foie artificiel utilisant des cellules souches devienne une alternative à grande échelle aux greffes.