Dojo, le supercalculateur de Tesla a emballé les marchés financiers et (encore) enrichi le patron de l’entreprise. Mais qu’est-ce que c’est que Dojo, qui fonctionne en partie avec des puces Nvidia, mais aussi avec ses propres processeurs maisons. Et à quoi sert-il ?
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Morgan Stanley s’emballe pour Tesla
Le 11 septembre, alors que le monde commémorait le triste souvenir de l’anniversaire de l’attentat islamiste le plus meurtrier de l’histoire, l’action Tesla faisait un bond de 10%, après la publication d’une note de Morgan Stanley “particulièrement stimulante”.
L’analyste en charge du dossier s’est montré particulièrement emballé et enthousiaste pour l’architecture de supercalculateur Dojo, développée par Tesla, qui repousserait “les limites du possible”. Les mots de l’analyste, en anglais, sont les suivants : “Tesla has developed an advanced supercomputing architecture that pushes new boundaries in custom silicon and may put Tesla at an asymmetric advantage in a $10trn TAM.”
La banque d’affaires pense même que cet ordinateur Dojo pourrait permettre de générer jusqu’à 500 milliards de dollars de valorisation, à une entreprise qui pèse déjà plus de 850 milliards de dollars, et dont l’action a pris environ 150% depuis le 1er janvier 2023. Rien que ça. Morgan Stanley concluait avec un objectif de cours relevé pour l’action Tesla, de 250$ à 400$ !
Le supercalculateur DOJO, un monstre de puissance
Mais qu’est-ce que ce superordinateur Dojo qui emballe les analystes, fait décoller le cours de l’action et rend l’homme le plus riche du monde encore plus riche ? En quoi un “simple” superordinateur, dont des dizaines de modèles sont développés partout dans le monde, confère-t-il un “avantage asymétrique” à Tesla ?
Dojo est un chantier lancé depuis cinq ans déjà par Tesla, et le constructeur a commencé à le produire officiellement depuis juillet 2023. Elon Musk s’est engagé à dépenser un milliard de dollars pour développer son supercalculateur au cours de l’année 2024.
Un ordinateur qui ne serait pas basé que sur des puces Nvidia, comme les très onéreuses et recherchées A100 (si importantes qu’elles sont devenues un argument de recrutement dans la Silicon Valley pour débaucher des experts à la concurrence). Mais sur des puces maison, développées par Tesla, les puces Dojo D1.

Le processeur Dojo D1 de Tesla fonctionnerait mieux que toute autre “puce” sur le marché, et serait plus rentable. Morgan Stanley estime que cette puce qui équipera le Dojo surpassera les GPU A100 de Nvidia, tout en réduisant les coûts et la consommation d’énergie de l’entreprise (des données qui ont leur importance malgré tout). Tesla ambitionne une puissance de 100 exaflops d’ici la fin de l’année 2024 pour l’ordinateur Dojo.
Pourtant, on estime aussi que Tesla aurait d’ores et déjà plusieurs milliers de processeurs Nvidia en sa possession, et a développé ses propres processeurs comme une alternative à la pénurie. En 2021, Musk expliquait déjà : “Nous prendrons le matériel aussi vite que Nvidia nous le fournira. S’ils pouvaient nous livrer suffisamment de GPU, nous n’aurions peut-être pas besoin de Dojo, mais ils ne peuvent pas le faire car ils ont tellement de clients.”
À terme, DOJO pourrait figurer parmi les cinq supercalculateurs les plus puissants au monde, au même rang que des monstres de puissances subventionnés directement par des États, comme la Chine et les Etats-Unis.

Un superordinateur chez Tesla, mais pour faire quoi ?
Qu’est-ce qu’une entreprise qui produit des voitures peut bien vouloir faire avec l’un des cinq ordinateurs les plus puissants du monde ?
- La voiture autonome
Dojo a été conçu pour entraîner le système de conduite entièrement autonome (Full Self Driving, ou FSD) qui doit équiper à terme chaque voiture Tesla. Il assiste également le système d’aide à la conduite de Tesla, Autopilot, qui a fait la réputation du constructeur ces dernières années.
Une fois qu’il sera suffisamment développé et puissant, le supercalculateur Dojo aura la capacité d’analyser des volumes de données toujours plus importants : un point crucial pour exploiter pleinement les centaines de téraoctets de vidéos et d’analyses que produisent tous les jours les quelques 4,5 millions de véhicules Tesla sur les routes.
- Le robot Tesla Bot
Un autre point moins mis en avant concerne la volonté de Tesla de développer ses propres robots, d’en faire un produit à part entière, et d’en faire un nouveau relai de croissance.
Alors que les capacités informatiques issues d’une progression continue de 50 ans permettent enfin d’envisager un robot tel qu’imaginé dans les années 70/80/90 – humanoïde, autonome, mobile, fort, fiable… – le marché commence à frémir et l’emballement est attendu pour la décennie en cours, ou la prochaine. Soit demain à l’échelle d’une entreprise comme Tesla, qui fête cette année ses vingt ans, et dont la progression a fait la fortune de son co-fondateur Elon Musk. En novembre 2022, Goldman Sachs évaluait les robots humanoïdes comme un marché annuel à 154 milliards de dollars.
Alors, pour développer les Tesla Bot et mettre au point une technologie de pointe, Tesla compte logiquement sur les capacités de calcul de son ordinateur Dojo. Un supercalculateur qui ne sera pas de trop pour mettre au point la partie logiciel d’un robot qui marche, qui parle, qui voit, qui aide, qui surveille… voire pire.
Elon Musk n’a jamais caché ses craintes d’une intelligence artificielle capable de dépasser les humains, ni qu’elle soit à la tête d’une armée de robots : Il est en train de développer les deux, et s’appuiera pour cela sur son superordinateur “Dojo”.
Pour en savoir plus sur Dojo : https://www.tesla.com/AI