__

Emeutes de juin 2023 : le bilan de la quatrième nuit de violences ville par ville

Bilan de la quatrième nuit d'émeutes qui a touché la France, région par région et ville par ville.

Entre le 30 juin et le 1er juillet 2023, une quatrième nuit d’émeutes et de violences en France plus diffuse sur les territoires mais globalement moins intense et moins grave que la précédente. Retour sur les faits principaux à retenir de cette quatrième nuit, ville par ville.

Auteur / Autrice :

Une quatrième nuit d’émeute en France, entre le 30 juin et le 1er juillet 2023

Une quatrième nuit d’émeutes, de violences et de saccages a embrasé la France du vendredi 30 juin au samedi 1er juillet, et tout particulièrement à Marseille, dans Lyon et sa banlieue, et en Ile-de-France.

Une quatrième nuit qui a vu la situation empirer dans certaines régions, et même débuter dans certaines campagnes, mais qui a néanmoins marqué un recul par rapport à la tragique nuit du 29 au 30 juin.

Selon le bilan actuel, qui devrait encore évoluer légèrement à la hausse dans les prochaines heures, 1 311 interpellations sont décomptés en France, selon un bilan définitif communiqué par le ministère de l’Intérieur.

Quelque 249 policiers et gendarmes ont été blessés légèrement. Au total, 45 000 membres des forces de l’ordre avaient été mobilisés par le ministère de l’Intérieur partout sur tout le territoire, dont plusieurs milliers à Paris et dans sa banlieue.

On relève pour l’instant 31 commissariats et 11 casernes de gendarmeries qui ont été attaqué cette nuit. Au moins 79 policiers et gendarmes blessés étaient recensés en fin de matinée.

D’après France Info, 266 bâtiments ont été incendiés ou dégradés, dont 26 mairies, 24 écoles et 5 établissements de justice. Pour cette quatrième nuit, 2560 incendies sur la voie publique ont été constatés contre 3 880 dans la nuit de jeudi à vendredi. On recense 1 350 incendies de véhicule contre 1919 la nuit précédente et 234 incendies ou dégradation de bâtiments contre 492 la veille”.

Après des journalistes agressés (Al Jazeera, Le Figaro, Libération, Le Point, Radio Bip, Le Media) hier, on note que ce sont plus des lieux LGBT qui ont été ciblé cette fois, à Brest ou encore à Paris.

Retour sur les principaux faits connus de cette quatrième nuit d’émeutes. Un listing partiel, établi avec les informations connues au moment d’écrire ces lignes, et qui pourrait s’alourdir.

Quatrième nuit d’émeutes de juin 2023 : le bilan des principaux faits en Île-de-France

La région IDF a été sensiblement moins touchée dans cette nouvelle nuit de violence qu’elle ne l’avait été les deux soirs précédents, mais on dénombre quand même plus de 400 interpellations, et de graves violences un peu partout dans les villes de petites couronnes.

Paris (75) :

  • Après une fin d’après-midi sous tension place de la Concorde, et des heurts à nouveau dans le quartier de Chatelet en début de soirée, les choses ont été finalement assez calmes dans Paris.
  • On relève quand même plusieurs départs d’incendies modestes (feu de poubelles essentiellement) et quelques vitrines brisées.
  • On note aussi que la boutique Opéra du pâtissier Cédric Grolet a été taguée, alors qu’il était victime d’un bad buzz orchestré à ses dépends sur les réseaux sociaux depuis plusieurs semaines (pour une histoire de tarte aux fraises pas équeutées).

Hauts-de-Seine (92) :

  • À Nanterre, une tentative d’intrusion a eu lieu cette nuit dans les locaux de la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ). Plusieurs incidents limités ont eu lieu avec les forces de police dans plusieurs quartiers de la ville.
  • À Chatillon, un McDonald’s a a été pillé.

Seine-Saint-Denis (93)

  • À Bondy, une nouvelle nuit de violences et de pillages presque aussi intense que les précédentes.
  • À Saint-Denis, un centre administratif a été touché par un incendie.
  • À Romainville, c’est un magasin de scooters qui a été pris d’assaut, dans le quartier des Trois-Communes.

Val-de-Marne :

  • À Créteil, au même moment qu’à Rosny, le centre commercial a été attaqué dans l’après-midi, au milieu de centaines de clients (voir notre article dédié).
  • À Bonneuil, le commissariat a été sauvagement pris d’assaut.
  • Plusieurs incidents ont été lancés à Ivry-sur-Seine.
  • À l’Haÿ-les-Roses, le maire a protégé sa mairie avec des barbelés.

Val-d’Oise (95) :

  • À Persan-Beaumont, la mairie et le poste de police municipale ont été en partie détruits par les flammes.

Yvelines :

  • À Chanteloup-les-Vignes, un local des Restos du cœur a été détruit.
  • À Conflans-Saint-Honorine, une crèche a été dégradée.

Si les choses ont globalement été plus calmes que les nuits précédentes dans la région, on dénombre quand même plus de 400 interpellations.

Quatrième nuit d’émeutes de juin 2023 : le bilan des principaux faits dans les autres régions de France

En dehors de la région parisienne, les choses ont en revanche pris un tournant négatif. Si le nombre de fais graves a diminué, on a assisté à un élargissement des zones touchées par la violence, les agressions et les saccages et pillages.

En particulier à Marseille, où une bande de plusieurs centaines de personnes a mis à sac une partie de la ville, mais aussi dans la région lyonnaise, historiquement (et tristement) connue pour des faits similaires.

On note aussi que certaines villes moyennes et leurs cités périphériques ont été touchées pour la première fois, et que certaines campagnes ont même fait l’objets d’actes divers (tirs sur des gendarmeries, incendies de champs…).

Provence-Alpes-Côte d’Azur et Occitanie

À Marseille :

  • De très nombreux actes très violents des émeutiers envers les forces de l’ordre et les civils de la fin d’après-midi au milieu de la nuit (dans une ville alors désertée par les passants). De très nombreuses agressions sur les personnes, mais aussi sur les pompiers et les ambulanciers.
  • Une armurerie a été pillée, et de nombreux des fusils de chasse dérobés.
  • Des dizaines de boutiques ont été pillés, saccagées et certaines partiellement incendiées : un sujet bien documenté dans cet article de l’Obs. Un bureau-tabac a notamment été pillé à l’aide d’un tractopelle.
  • Une église évangélique a été attaquée.
  • Un journaliste aurait été agressé “par un groupe de jeune au vieux port, et aurait “la mâchoire brisé et l’arcade ouverte”.
  • La veille, rappelons qu’un car transportant une quarantaine de touristes chinois avait été violemment attaqué, décidant immédiatement de fuir la ville et le pays, en direction de la Suisse.
  • 95 personnes qui ont été interpellées dans la nuit de vendredi à samedi dans la ville, pour 31 policiers blessés. La nuit précédente (voir notre article dédié), 56 personnes avaient été interpellées et 28 policiers avaient été blessés.

Ailleurs :

  • À Montpellier, un lycée a été attaqué, plusieurs magasins ont été cassés et pillés (dont Swarovski, Orange et The North Face, entièrement dévalisés). Le poste de police de la Mosson a essuyé des tirs “fournis” de mortier. D’après la préfecture de l’Hérault, 12 personnes ont été interpellées, dont 2 à Béziers.
  • À Alès, un commissariat a été incendié sans trop de dommages.
  • À Nîmes, une nuit très violente : plusieurs groupes de dizaines de personnes s’en sont pris aux policiers, aux véhicules, aux vitrines (notamment à une banque), mais aussi aux caméras de surveillance.
  • À Bagnols-sur-Cèze, un Burger King, une enseigne Sport 2000, un pressing et un salon de coiffure ont été pillés. 
  • À Quissac, plusieurs tirs de mortiers sur la caserne de gendarmerie
  • À Toulouse, une concession de motos a été la cible d’une attaque d’une trentaine d’individus, totalement pillée et “défoncée”.

On dénombre 16 interpellations dans les Alpes-Martitimes, essentiellement sur Nice, Grasse et Cannes.

Grand Est

  • À Metz, une médiathèque a été incendiée. Les nuits précédentes, une salle de concerts avait été saccagée et une mairie de quartier incendiée.
  • À Strasbourg, si la soirée et la nuit ont été relativement calme, on notait la veille (vendredi 30) dans l’après-midi des tirs de cocktail Molotov sur les policiers. Un Apple store et un magasin Lacoste ont été pillés.
  • À Yutz, un McDonald’s a été incendié.

On recense aussi des faits à Laneuveville, Vandœuvre-lès-Nancy, Creutzwald, Folschviller, Freyming-Merlebach, et bien sûr Mulhouse et Thionville. Dans la Marne, 36 personnes ont été interpellées. En Meurthe-et-Moselle, lieu de villégiature favori du rappeur Booba, 16 personnes ont été interpellées. 

Hauts-de-France, Bretagne et Normandie, Pays de la Loire et Centre-Val de Loire

  • À Brest, des lieux inclusifs et LGBT ont été ciblés (Happy café et Aiglon). Quartier Bellevue, la mairie et deux agences bancaires ont été attaqués. Du côté du quartier Kerourien, un centre social qui a été entièrement détruit, et une salle de sport neuve a brûlé. Un KFC a été ciblé par des départs d’incendies, et plusieurs vitrines brisées à proximité. Cinq personnes au moins ont été interpellées.
  • À Rennes, des échanges de tirs ont eu lieu, vers Blosne. Un commerçant interrogé par France Info témoigne : “Quand on est arrivé ce matin, les pompiers étaient en train d’éteindre les incendies, on a essayé de mettre les cartouches de fusil sur le côté. Je ne comprends pas qu’on puisse tirer sur des policiers avec ça. Ça n’a plus rien à voir avec le jeune qui s’est fait tuer.” 
  • À Lorient, dans le centre-ville, une soixantaine d’individus se sont confrontés aux policiers jusqu’au milieu de la nuit. Quatre personnes ont été interpellées.
  • À Amiens, la médiathèque d’Etouvie a de nouveau été incendiée, et plusieurs voitures ont été saccagés et brûlés, tout comme un camion. Seize personnes ont été interpellées.
  • À Mons-en-Barœul, des jeunes se sont amusés à détruire un poteau avec une pelleteuse.
  • À Lille, les choses ont été relativement calmes, malgré quelques situations tendues, notamment a place de la Nouvelle-Aventure dans le quartier de Wazemmes. 
  • À Maubeuge, une soixantaine d’individus s’en sont pris à des commerces du centre-ville. Un garage automobile a été vandalisé et les émeutiers ont tenté de piller un supermarché.
  • À Boulogne-sur-Mer, une centaine de jeunes s’est attaquée aux vitrines de commerces du Chemin Vert.
  • À Lens, un poste de police du quartier a été vandalisé par des individus cagoulés cité de la Grande Résidence.

Dans le Pas-de-Calais, 36 personnes ont été interpellées, principalement à Lens et Saint-Omer. Dans le Nord, on dénombre 82 interpellations et 7 membres des forces de l’ordre blessés.

En Loire-Atlantique, Saint-Nazaire et La Roche-sur-Yon ont connu leur première nuit de tensions : à Saint-Nazaire, plusieurs magasins ont été pillés et on recense des tirs de mortiers, et le poste de police de la Roche-sur-Yon a été victime d’un début d’incendie.

Auvergne-Rhône-Alpes

Une région très touchée, et au moins huit bâtiments publics ont subi des dégradations, mais le décompte est encore en cours :

  • À Vaulx-en-Velin, au moins quatre policiers blessés par arme à feu. Certains médias parlent de sept blessés.
  • À Vénissieux, l’embrasement a été très fort aux Minguettes : agressions, voitures pillés puis brûlées, mobilier urbain détruit…  L’école Paul-Langevin a été lourdement dégradée.
  • À Givors, la nuit a été particulièrement tendue. De graves incidents ont éclaté aux abords de l’hôtel de ville après minuit. Une cinquantaine d’individus ont affronté les forces de l’ordre durant plusieurs heures.
  • À Décines, le lycée Charlie-Chaplin a été attaqué.
  • Les mairies de Givors, Grigny, Brignais ont été attaqués et diversement endommagés.
  • À Lyon :
    • Dans le quartier de la Duchère, des tirs nourris de kalachnikov.
    • Un concessionnaire de motos a été pillé.
    • Au moins une trentaine de commerces ont été pillés puis saccagés, dont une la boutique Orange, un Micromania, un Pandora, plusieurs magasins de sport (Courir et JD Sport rue de la République), des enseignes de luxe (Louis Vuitton et Lacoste), des magasins d’électroménager (Boulanger) et plusieurs supermarchés dont au moins deux Monoprix (“Ils ont volé et emporté des bouteilles d’alcool.”, selon le personnel.
    • Un bureau de Poste a été ciblé par une explosion et totalement dévasté, du côté de Mermoz.
    • Le centre social de Lyon 5 a été lourdement dégradé.
    • Le commissariat de Lyon 4 a été saccagé.
  • À Grenoble, de longs et nombreux affrontements ont opposé des groupes tirant des mortiers sur les policiers, qui ont répliqué avec des grenades de gaz lacrymogène. Des magasins ont été pillés, et certains incendiés. On aussi vu des émeutiers s’en prendre à…un arbre. Le maire Éric Piolle évoque “un sentiment de dégoût”. Une soixantaine de personnes ont été interpellées.
  • À Chambéry, une école a été méthodiquement incendié avec de l’essence.
  • À Saint-Étienne, des pillages dont un magasin Orange.
  • À Saint-Florentin, un magasin de bricolage a été incendié.
  • À Annemasse, la maison de quartier Nelson Mandela a été complètement détruite par les flammes.
  • À Cluses, de long affrontements une partie de la nuit, et de nombreux tirs en direction des policiers.
  • À Chambéry, le bâtiment de la Fédération des œuvres Laïques a été détruit par les flammes. 10 personnes interpellées dans la nuit.
  • À Villefontaine, des bibliothèques, des agences bancaires, des voitures ont de nouvelles fois été la cible d’incendies.

On relève aussi des violences à Dijon et Beaune, à Mâcon, Sens, Auxerre, Saint-Florentin, Joigny, Migennes, Tonnerre, et même à Albertville en Savoie. Dans le département de l’Yonne, plusieurs commissariats et brigades de gendarmerie ont été pris pour cible.

En Haute-Savoie, 15 personnes ont été interpellées, et un policier a été blessé. Dans le département de l’Isère, 61 personnes ont été interpellées. 

Pour le préfet de l’Isère, Laurent Prévost : “Qui peut sérieusement penser que quand on va piller dans des magasins, on est dans la réponse à l’émotion légitime au décès du jeune Nahel, là, on est devant des pilleurs et des casseurs, rien de plus.”

Bourgogne-Franche-Comté

  • À Clermont-Ferrand, plusieurs bâtiments ont été incendiés dans les quartiers nord de la ville dont un centre social et une maison de quartier. Une école maternelle a été endommagée. Un siège social de centres de vacances VVF a aussi été très endommagé. Plusieurs véhicules ont été brûlés à l’Institut des métiers.
  • À Cournon d’Auvergne, les locaux de la police municipale ont été attaqués, et plusieurs commerces ont également été vandalisés

Nouvelle-Aquitaine

  • À Bordeaux, une dame très âgée a été agressée Place de la Bourse, avant qu’un homme qui a tenté de la défendre ne soit lui aussi lynché. La situation a globalement été tendue entre la fin d’après-midi et minuit, avec beaucoup de violences, souvent contre les personnes (comme très souvent dans la ville cependant).
  • À Limoges, au moins quatre magasins ont été dégradés et pillés en centre-ville (dont Marionnaud, Lacoste, Foot Locker et Kiko), un supermarché (Super U) a été incendié, et une voiture bélier a forcé un magasin Cash Converter. Quinze personnes ont été interpellées.
  • À Agen, plusieurs dizaines d’émeutiers ont attaqués des commerces dans les quartiers de Montanou, de Rodrigues, et à Tapie, et en ont brûlé plusieurs. Dans le quartier de Rodrigues, une commerçante explique avoir “tout perdue” après que son salon ait été entièrement incendié par ses propres voisins.
  • À Niort, dans les Deux-Sèvres, une soixantaine de personnes ont brûlé des voitures, deux baraques et des engins de chantier. 
  • À Bayonne, 5 personnes ont été interpellées. Des jets de projectiles ont détruit la vitrine d’un bureau de Poste et une quinzaine d’individus ont tenté d’établir un barrage et d’y mettre feu, sans succès. 

Un état des lieux non-exhaustif mais cependant très lourd, qui montre que de plus en plus de villes ont été atteintes par cette flambée de violence.

Mais il faut constater que les choses ont été moins graves pour cette quatrième nuit, et on peut espérer que la tension cesse presque totalement d’ici la fin du week-end, alors que les messages d’appel à l’apaisement se multiplient depuis 48h.


Enfin, pour finir sur une note plus légère et positive, écoutons ces mots très intéressants de l’influenceur francilien Golozer :